L’état de l’école, les dépenses pour l’école, selon le ministère et en 2013

Depenses educationJ’en avais déjà parlé le 9 juin sur ce blog, en citant des chiffres tirés de documents trouvés sur le site du ministère de l’EN et sur le site de la cour des comptes.

Rapidement, le ministère évalue la dépense du pays dans le 1er degré à 5870€/élève et par an en 2011,, dont 38,4% pour les communes, soit 2272€/élève et par an, contre 3598€/élève et par an pour l’état.
En croisant avec les chiffres de la cour des comptes, dans son rapport sur l’exercice 2013 du budget de l’Etat, combiné avec le nombre d’élèves à la rentrée de septembre 2012, on trouve une dépense de l’Etat de 2790€/élève du public et par an, ce qui laisserait, pour un total de 5870€/élève, pratiquement le même montant pour les communes.

Inutile de redouter la municipalisation de l’école publique, c’est déjà fait.

C’est même beaucoup plus avancé, car le ministère, comme la cour des comptes, n’intègrent pas dans les dépenses des communes tout ce qui relève du périscolaire. Les dépenses comptées sont celles de la fonction enseignement du plan comptable des communes. On y trouve l’entretien et le fonctionnement du bâtiment, l’amortissement de sa construction, le salaire des Atsems et le financement de la restauration scolaire. On y trouve pas toutes les activités périscolaires comme les garderies et les centre de loisirs qui appartiennent à la fonction jeunesse du plan comptable.

Vu depuis la commune, c’est pourtant de l’argent dépensé pour les mêmes enfants, souvent dans les mêmes locaux. Et avec la réforme des rythmes scolaires, où le périscolaire devient un volet intégré au système éducatif, cette intégration est encore renforcée. Mais elle ne s’exprime pas dans la comptabilité publique et il est difficile de l’en extraire, puisqu’on trouve dans la même fonction les dépenses pour les crèches, pour les maisons des jeunes et bien d’autres choses.

On peut imaginer d’aller dans les détails du plan comptable, mais c’est un travail colossal à faire pour chaque commune.. Si j’extrapole à partir des chiffres de Mennecy, les communes dépenseraient 2 fois plus d’argent que l’état pour chaque élève du premier degré dans le public. En 2013, l’état a dépensé 18 milliards d’euros pour le 1er degré.

Depuis le 9 juin, j’ai découvert d’autres publications sur le site du ministère et voici ce que j’en tire.

Image Etat de lecoleTout d’abord, le document intégral dont est tiré le graphique plus haut, l’état de l’école en 2013. Cliquer sur l’image pour ouvrir le PDF

On y retrouve bien la dépense du pays pour le 1er degré (page 15), à cela près que les 5870€ de 2011 sont devenus 6010€ actualisés en valeur 2012, dont 38,9% pour les communes, avec la réserve que j’ai fait plus haut.

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Image courbe evolution personnel ENOn y trouve que 75% de cette dépense est consacrée au personnel, de l’état ou des communes.

Personnel qui diminue dans le 1er degré, alors que le nombre des élèves y augmente (page 27).

Un peu plus loin, page 35, on parle de taux d’encadrement.

Image taux encadrementEt on découvre que le nombre de postes d’enseignants par bloc de 100 élèves diminue d’année en année, 5,3 postes pour 100 élèves ou encore 18,4 élèves pour chaque poste d’enseignant. La moyenne dans les pays de l’OCDE est de 15,4 élèves par poste d’enseignant!

Multiplier ce nombre de 18,4 par 3000 euros pour avoir une estimation de la dépense de l’état, chaque année, dans chaque classe en moyenne. S’il y a 30 élèves dans la classe de vos enfants, remplacer 18,4 par 30. Puis comparez à ce que coûte l’enseignante qui est devant les enfants, et demandez vous alors où passe la différence, car c’est une très bonne question à laquelle ce document sur l’état de l’école ne répond pas.

Image couv geographie de lecoleMais il y a pire à découvrir, et il s’agit maintenant de l’égalité devant un service public national. Cette fois, nous allons parcourir un autre document trouvé aussi sur le site Internet du ministère: la géographie de l’école 2014. Cliquer sur l’image à gauche pour ouvrir le PDF (55MB)

Ce document rassemble des cartes très pertinentes sur l’école dans le pays et permette de saisir des disparités importantes dans un service public en théorie égal pour tous…

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Image carte evolution effectifsEn premier lieu, page 23, l’évolution des effectifs dentre 2003 et 2013. Si le total a augmenté de 212000 élèves, soit 2,4%, cette variation n’est qu’une moyenne. On voit que, par exemple, en Essonne, nous sommes dans la tranche +4 à +10%

Retenez bien les zones à dominante verte, celles qui baissent, et les zones à dominante bistre, celles qui montent.

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Image carte depense par eleveLà, nous avons la dépense de l’état par élève du 1er degré (page 49).

Sur tout le pays, 3130 euros par élèves en 2011 et actualisés en valeur 2012. On constate que les régions où cette dépense est la plus élevée sont celles où les effectifs diminuent!

Les écarts sont importants. Les régions les mieux dotées sont à près de 40% au dessus de la moyenne nationale! Et ces régions voient la dépense de l’état continuer à y augmenter!

Image carte encadrementImage difference taux encadrementA propos du taux d’encadrement maintenant, c’est à la page 53. En haut à gauche, nous avons le nombre de postes d’enseignant pour 100 élèves, en haut à droite, le nombre d’élèves par classe et, à gauche, la différence entre le nombre de postes et le nombre de classes pour 100 élèves.

Il y a, en moyenne, 25 élèves par classe en 2013-2014. Pour 100 élèves et donc en moyenne pour 4 classes, il y a 5,2 postes d’enseignant. Mais, dans les départements les mieux dotés, il y a moins de 20 élèves par classe, plus de 6,2 postes pour 100 élèves et 1,5 postes de plus que de classe par 100 élèves. Et, le contour esquissé par ces écarts correspond, grossièrement, à la zone où les dépenses par élève sont les plus élevées.
Normal me direz vous. Puisque 75% de la dépense est dans le personnel, là où il y a le plus de personnel pour 100 élèves, c’est là que la dépense sera la plus élevée. Mais si en plus, cela correspond à la région où les effectifs diminuent, on comprendra que l’éducation nationale ne gère pas au mieux ses ressources humaines et crée de la disparité au détriment des régions où la démographie scolaire augmente.

En passant, l’Essonne y ressort comme le département avec les classes les plus chargées du pays. Notez aussi que si ce document contient un chapitre consacré aux dépenses des collectivités dans l’enseignement du 2nd degré, il n’y a rien à propos des dépenses des collectivités, c’est à dire les communes, dans l’enseignement du 1er degré.

C’est très certainement un point qui devrait fixer l’attention du ministre de 2014 et sur lequel la cour des comptes avait déjà fait des observations sévères en 2008 (voir l‘article de mon blog du 9 juin 2014): les relations Etat-communes pour l’école sont mal définies, les missions de chacun ne sont pas ou peu définies, il n’y a pas de mesures possibles sur la qualité et la performance des dépenses qui y sont faites.

 

Image carte ratio ages enseignantsPage 57 maintenant et à propos de l’âge des enseignants. A gauche, dans le 1er degré public, le ratio des plus de 50 ans sur les moins de 30 ans montre clairement un tropisme vers le sud et l’ouest. Dans le privé, c’est moins évident à part pour la frange nord de la métropole. Mais nous tenons ici une part de la raison de la faiblesse des dépenses de l’Etat dans, par exemple l’Ile de France où les enseignants du public sont plutôt jeunes et donc moins payés.

Nous voyons ici une autre faiblesse du système éducatif: l’argent investi par l’état est orienté plutôt vers les territoires « faciles » où la démographie diminue, et les enseignants les plus jeunes sont concentrés là où les enjeux sont les plus difficiles et en étant les moins payés.

Image carte mobiliteIci, nous sommes à la page 61 et à propos de la mobilité des enseignants. On y voit que la banlieue de Paris est une terre d’exil d’enseignants jeunes qui ne souhaitent que vieillir ailleurs. Dommage, car c’est aussi un des territoires où les élèves ont le plus besoin de la motivation des enseignants.

Et enfin, c’est ce dont la presse a parlé récemment, les cartes de l’échec:

Carte zone risque echec scolaireCarte non diplomes.

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Ces 2 cartes, du 1er coup d’oeil, n’ont rien à voir avec toutes celles qui ont été montrées plus haut. C’est le signe que le « système éducation national » n’est pas adapté aux enjeux de notre démographie, de notre territoire et des besoins du pays.
C’est là qu’est le coeur de la mission du ministre, et pas dans les rythmes ou le codage à l’école.

Image couv atlas academique de lechecPour aller plus loin, consulter l’atlas académique des risques sociaux d’échec scolaire (29 MB).

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Couv NI depense par eleveEt enfin, une note d’information du ministère sur la dépense par élève ou étudiant en France et dans l’OCDE.

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A propos Jean Féret

mel: jean.feret @ mennecy.net ... tel: 06 74 09 27 07
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