Prix du gaz et de l’électricité

A l’occasion d’une note un brin polémique, Jean Paul Reynaud a attaqué mon collègue Jean-Philippe Dugoin parce qu’il aurait été trop indifférent à propos des hausses répétées des tarifs du gaz et de l’électricité, en particulier parce que la crise est dure et pousse beaucoup dans la précarité énergétique.

Ce n’est pas vrai, car Jean Philippe Dugoin s’était élevé contre la demande d’une hausse de 20% en 3 ans faite par l’ancien PDG d’EDF, Mr Gadonneix. C’est ici, le 10 juillet 2009 sur son blog. Plus tard, la hausse accordée par le gouvernement a été limitée à 1,9% et Jean Philippe Dugoin s’en est félicité ici, le 5 août sur son blog.

J’ajoute encore que Mennecy a été évoquée jusque devant les actionnaires d’EDF réunis en assemblée générale, pour répondre à une question que j’avais posée, en tant qu’actionnaire, au président du conseil d’administration. Sa réponse a été résumée dans une note que j’ai publiée sur mon blog, ici, le 19 mai 2010.

Difficile d’affirmer que rien n’a été fait: la position de Mennecy est montée jusqu’au président d’EDF, la réaction du président d’EDF est maintenant travaillée par le SIARCE avec le soutien de la Fédération Nationale des Autorités Concédantes. Vous serez informés de la progression de ce sujet au moins via ce blog.

On peut encore faire plus en posant la question sur la nécessité d’augmenter les tarifs réglementés du gaz et de l’électricité.

En fouillant un peu à l’INSEE, on trouve un historique du prix de l’énergie pour les ménages:

Prix de l'énergie pour les ménages

Attention, ce sont ici des prix du Kwh pour des ménages types, en tarifs réglementés pour le gaz et l’électricité, en euros constants de 2006.

De 1960 à 2006, le prix du gaz et de l’électricité a diminué, et de 50%! Formidable! mais même si on s’y habitue facilement, ce n’est probablement pas possible de soutenir ce rythme pour toujours. Malheureusement, ce graphique à l’INSEE s’arrête à 2006.

Alors, en cherchant un peu aussi à l’INSEE, on trouve ceci:

Historique tarif électricité réglementé

Attention, ici les prix sont en indices, avec la base 100 à mi 1998, et le prix représenté n’est pas actualisé comme pour le graphique précédant.

Mais on constate que, passé 2006 et jusqu’à maintenant, une progression du prix de 7%, en un peu plus de 3 ans. La hausse de 1,9% de 2009 n’est donc que la prolonguation d’une politique tarifaire démarrée en 2006.

Est-ce justifié?

EDF est une société anonyme, avec des actionnaires privés (j’en suis un avec une des 1.700.000.000 actions en circulation), cotée en bourse, et active sur un marché ouvert. Ce marché est régulé, par une commission de la régulation de l’énergie, une autorité administrative qui veille au bon fonctionnement de ce marché. Et cette commission met à disposition du public des statistiques sur les prix et les volumes échangés.

Ainsi, le prix des contrats sur de l’électricité achetée à 1 année d’avance:

Contrats electricité à 1 an

Le prix de gros de l’électricité achetée à 1 an baisse depuis l’été 2008. Le Kwh en « base », c’est à dire hors pointe, se vend maintenant maintenant 5,5 cts pour une livraison en juin 2011. Il faudra ajouer à ce prix le coût du transport (les lignes THT) puis celui de la distribution (les réseaux basse tension, le comptage, la facturation, c’est à dire la prestation d’ERDF à Mennecy).

Chose curieuse, c’est la même chose pour les prix « spot », c’est à dire les prix de l’électricité achetée pour le lendemain:

Electricité à 1 jour

Evidemment, c’est beaucoup plus volatile, mais en 2010, le prix de l’électricité à livrer pour demain, à 4cts/Kwh, est même inférieur à celui de l’électricit achetée 1 an plus tôt pour être livrée maintenant, à 5 cts/Kwh. C’est un effet de la crise économique, avec des volumes livrés plus faibles que prévu dans l’industrie. Cela avait été aussi expliqué à l’AG d’EDF, en ajoutant que la rigueur de l’hiver avait fait augmenter les volumes facturés aux ménages pour arriver à une faible progression en 2009 par rapport à 2008.

Mais ce qu’il faut retenir, c’est que ça baisse, et qu’il est impossible de comprendre une hausse du tarif réglementé si on s’appuie sur les prix du marché. Par contre, s’il s’agit de soutenir EDF pour les investissements, qu’ils soient à l’étranger chez British Energy ou aux USA avec Constellation, ou encore en France avec la prolonguation des centrales nucléaires, alors on peut comprendre.

Mais c’est une perversion du statut de société anonyme. C’est l’actionnaire qui devrait apporter le capital pour investir, et pas le client. Le client achète un produit ou un service, l’actionnaire achète un revenu futur. Mais faire acheter des centrales nucléaires par les clients d’EDF et rémunérer plus tard les actionnaires actuels, c’est une perversion du système.

Alors, les 20% en 3 ans demandés en 2009 par le PDG précédant s’avèraient réellement injustifiés. Par contre, la nécessité d’investir pour obtenir dans l’avenir un dividende, la direction d’EDF parle de dividende nucléaire, est évidente. C’est grace aux investissements massifs faits par l’Etat il y a 20 à 30 ans dans le nucléaire que nous avons une électricité bon marché, et dont le prix a baissé depuis 35 ans.

Et c’est un véritable choix stratégique de choisir entre soit un investissement public, l’Etat fait une augmentation de capital, soit un investissement privé, en recourant aux marchés financiers pour une augmentation de capital. La démonstration de la question posée par l’actionnaire individuel Jean Féret m’encourage à penser que si la gouvernance actuelle est poursuivie, le recours au privé et en maintenant une part majoritaire de l’Etat, des salariés et des Français serait surement très efficace.

Et pour le gaz?

La commission de régulation de l’énergie fournit aussi des statistiques interessantes. Mais avant tout, il y a une différence essentielle à retenir. Alors que l’électricité est produite en France, le gaz est produit à l’étranger, il faut l’acheter ailleurs.

Comme pour l’électricité, la CRE fait un historique des contrats à 1 an et à 1 jour:

Gaz à 1 an et à 1 jour

On voit que c’est beaucoup moins volatile que l’électricité. NBP, c’est le marché britannique. Nous comparons ici des prix au débarquement à Montoir, en Gironde, où à la livraison par gazoducs en Allemagne, avec des prix sur un marché ouvert de négoce, à 1 jour et à 1 an.

Les fournisseurs ont augmenté leurs prix fin 2009, mais le marché ne suit pas, et les prix baissent. Les prix du « spot » sont eux aussi inférieurs à ceux du long terme. C’est encore un effet de la crise économique.

Et encore une fois, on ne trouve pas de justification d’augmentation du tarif réglementé en France pour les ménages dans les marchés.

Sauf à ce que, comme pour l’électricité, le consommateur en tarif réglementé soit sollicité pour participer aux finacements d’opérations d’investissement. Et encore une fois, comme pour EDF, c’est une pervesion du statut de société anonyme de GDF Suez.

Au fait, personnellement, j’ai un contrat de fourniture de gaz et d’électicité basique (pas d’heures creuses, pas de mode été ou hiver, le Kwh coûte toujours le même prix) avec un prix fixe sur 2 ans à 10,665cts/Kwh TTC en électricité, et à 5,382cts/Kwh TTC en gaz. Mon prochain changement de prix sera à la mi 2012. L’électricité que j’achète est compensée par l’achat de certificats d’énergie renouvelable de type RECS. Et je peux affirmer que l’électricité que j’achète est, à 21%, renouvelable.

En 2009, la ville de Mennecy a acheté son électricité à EDF, en tarif réglementé seulement, à 11,71cts/Kwh TTC C’est de l’électricité 100% non renouvelable.
Pour le gaz, tous les contrats sont chez GDF en tarifs réglementés, sauf la mairie Jacques Broz qui a été souscrite curieusement en tarif du marché libre, 2 semaines après la disparition du tarif réglementé pour ce type de consommation. Le DST de l’époque saurait surement nous expliquer cette curiosité.
En 2009, la ville a acheté du gaz à GDF pour 4.034.576 Kwh et 224.978€TTC, soit 5,58 cts/Kwh TTC. Pour le gaz comme l’électricité, aucun prix n’est fixe

Aucun effort n’a été entrepris jusqu’à présent pour faire un appel d’offres ou envisager de passer par une centrale d’achat, parce qu’on a toujours fait comme ça et que Jean Féret commence à agacer la direction des finances! C’est sur ce type de discussion pourtant qu’une opposition intelligente pourrait s’exprimer en poussant au débat sur les choix entre tarifs réglementés ou négociés, le recours à l’appel d’offres et quel type de marché, ou le recours à une centrale d’achat. Mais je crois qu’on en est encore très loin. Dommage, car les possibilités offertes aux collectivités pour maîtriser les budgets énergie, pour stimuler les investissements par des subventions, ou encore pour consommer de l’énergie renouvelable sont nombreuses et les bonnes méthodes ne sont pas uniques.

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